50e saison à Beaumont-St-Michel
- André Maccabée
- 30 juin
- 5 min de lecture
Le Théâtre Beaumont-St-Michel a célébré en grande pompe le lancement de sa nouvelle saison estivale, sa 50e. Si l'on considère que l'âge d'or de ce type de théâtre correspond aux années 80-90, le demi-siècle que vient de franchir cette institution théâtrale relève véritablement de l'exploit. Que de chemin parcouru depuis 1975, que de grands noms associés à ce joyau culturel de la région de la Chaudière-Appalaches dont ses trois fondateurs: Lionel Villeneuve, Yves Létourneau et Jean Duceppe. Mais aussi que d'évènements dramatiques dont la mort subite en 1984 de l'immense comédien Pierre Dufresne. Et que dire du terrible incendie qui a tout dévasté dans la nuit du 15 au 16 juillet 1987. Inimaginable.

Il en fallait davantage pour décourager Claude -André Roy, propriétaire et producteur, associé au Théâtre Beaumont-St-Michel depuis 1983. Cet homme de culture, de passion et de grande générosité a su au fil du temps relever bon nombre de défis. Encore aujourd'hui, il porte avec fierté et panache le flambeau qui continue d'illuminer les yeux du public et ceux de ses proches collaborateurs.
Sur le plan historique cette fabuleuse aventure théâtrale se décline en cinq grands actes. En voici d'ailleurs une sommaire description:
acte 1: Une grange devient théâtre d'été ( 1975-1982), acte 2: Nouvelle équipe, nouveau souffle (1983-1986), acte 3: Reprise réussie malgré un autre coup dur (1986-1987), acte 4: Une direction générale marquante (1997-2017), acte 5: Renouveau et pérennité (2018 à aujourd'hui).
Pour célébrer les 50 ans de Théâtre en été dans Bellechasse, l'institution a préparé une exposition qui retrace les artisans, artistes et faits saillants qui ont marqués les beaux jours du Théâtre et du coup l'imaginaire collectif. Cette émouvante exposition déployée principalement à l'extérieur est accessible au public (du mardi au samedi dès midi) et se poursuit jusqu'au 30 août prochain. À découvrir, impérativement.
Au-delà du caractère historique du Théâtre Beaumont-St-Michel, il ne faut pas oublier la pièce qui tient l'affiche tout l'été: Moutarde forte. Mise en scène par Robert Bellefeuille, on y retrouve à la direction artistique Reynald Robinson, un habitué puisqu'il exerce cette fonction depuis 2018. Les interprètes sont au nombre de cinq et comptent notamment Nathalie Malette et Patrice Coquereau, deux complices de longue date qui ont des feuilles de route plutôt impressionnantes comme acteur.trice et comédien.ne. D'ailleurs, tout dernièrement, ils ont incarné en version théâtrale la mythique série télévisuelle Symphorien, Nathalie incarnant le rôle de Mlle L'Espérance et Patrice, comme on le devine, celui d'Oscar Bellemare.

Moutarde forte raconte l'histoire d'un couple installé depuis des années dans une jolie maison du Vieux-Lévis, avec vue imprenable sur Québec. Gilles, 65 ans, est un entrepreneur à succès tandis que sa conjointe Christine, de 15 ans sa cadette, engrange les désillusions conjugales. Bien enracinée dans son nouveau statut de quinquagénaire, Christine n'a que faire de l'insolence, de l'indélicatesse et de la condescendance de son conjoint. Elle décide de se lancer à "corps et à coeur perdus" dans une relation extraconjugale avec un garçon beaucoup plus jeune. Gilles, fin manipulateur, tente désespérément de la reconquérir en s'exerçant à la démagogie et à la puérilité. En fait, tout raisonne faux chez lui. Il finira par rencontrer Adam, le jeune amant de sa femme, et son discours abrasif germera dans la tête de celui-ci déstabilisant au passage ses ambitions amoureuses.
En entrevue, Nathalie Malette (Christine) et Patrice Coquereau (Gilles) me confient leur bonheur, non pas de quitter la métropole - ils sont tous les deux "montréalistes" - , mais plutôt de se retrouver dans ce lieu mythique par son histoire, et magique par son environnement. Je cite Nathalie : "Sortir de Montréal tout un été, être au bord du fleuve, pratiquer mon métier, je trouve que c'est formidable. C'est comme un mélange de travail-vacances. La région est superbe. Ça fait plusieurs fois que je viens ici et à chaque fois je trouve ça beau. À St-Michel, là où je réside, toutes les maisons sont blanches, c'est magnifique." Et Patrice de renchérir : " Suis payé pour m'amuser". Cela en dit long sur leur état d'esprit. Nathalie en est à sa 4e présence à ce théâtre alors que c'est la toute première fois pour Patrice. Tous les deux sont très complices sur scène. Patrice raconte et je le cite: "Nous avons beaucoup de facilité à rire ensemble. À chaque fois, nous sommes contents de nous retrouver. Nous sommes comme un couple, un couple théâtrale ". À la question, pourquoi devrait-on assister à une représentation de cette pièce ? Nathalie y va de l'affirmation suivante: " C'est une pièce intelligente. C'est une pièce qui parle du couple, de la complexité d'être ensemble longtemps (20 ans), de la remise en question dans le cinquantaine. " Et Patrice d'ajouter: " C'est une comédie qui a un fond de réalisme, de vraisemblance. Les gens peuvent se reconnaître, reconnaître des dynamiques hommes-femmes traditionnelles. "
Je laisse le mot de la fin à Louise Allaire, directrice du Théâtre Beaumont-St-Michel: " Les gens arrivent souvent vers 15:30, histoire de prendre l'apéro sur la terrasse. Ça se poursuit avec un buffet (froid-chaud) avec un réputé traiteur de la région de Québec. Ça fait plus de dix ans que nous sommes partenaires". Elle poursuit et conclut dans les termes suivants: " Nous recrutons des gens de la place, souvent des étudiants du secondaire 4-5 qui vont agir en tant que personnel d'accueil ".
Avouons que c'est un superbe environnement de travail pour des jeunes qui habitent le secteur. Qui plus est, cela les lance sur le chemin de la culture en empruntant des chemins de traverse tels que l'histoire et le théâtre. Un pari gagnant pour eux, un pari gagnant pour la direction, un pari gagnant pour qui se déplace vers le Théâtre Beaumont-St-Michel pour découvrir cette amusante et sympathique pièce, et par le fait même découvrir les 50 ans d'histoire de cette institution culturelle. Dans le monde du sport, il y a une expression qui dit : " Y mettre de la moutarde." Nous sommes ici dans le faire semblant, le "flash", l'exagération. Ce n'est pas le cas pour le Théâtre Beaumont-St-Michel, croyez-moi. De la moutarde forte à saveur d'authenticité. De la moutarde forte à saveur d'esthétisme. De la moutarde forte qui donne à penser que les bonnes choses ont un goût intemporel puisque les saveurs du passé et celles du présent se marient à perfection.
Pour de plus amples détails et informations sur la pièce en elle-même et le Théâtre Beaumont-St-Michel, je vous invite à consulter le lien @ suivant:
Un grand merci à Nathalie Malette, Patrice Coquereau et Louise Allaire pour le temps accordé lors de l’entrevue. Un merci de même nature a Bernard Laberge, directeur des relations clients et médias à Bambou Communication pour son invitation.
Sylvain Tremblay
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