Nicolle Dufour, celle qui a cru en Serge Fiori avant tout le monde

Tout le monde a été attristé par le décès de Serge Fiori, survenu symboliquement le jour de la Saint-Jean, comme un dernier salut d’un grand patriote. Une semaine à peine après avoir été fait chevalier de l’Ordre national du Québec, il s’éteignait, laissant derrière lui une œuvre inoubliable.

Mon amie Nicolle Dufour, qui a été la toute première à croire en lui, a joué un rôle déterminant dans le départ de sa carrière. Elle nous partage donc ce souvenir émouvant.

« Le départ de Serge m’ébranle profondément. Il me ramène des décennies en arrière, à l’époque où j’étais directrice des relations publiques pour la maison de disques Quality. Nous représentions exclusivement des artistes anglophones — des noms comme Kiss, Donna Summer ( dont on voit Nicolle à gauche) Ray Charles, Guess Who, Peter Gabriel... Aucun artiste francophone n’avait encore franchi nos portes.

Un jour, la réception m’informe que deux jeunes musiciens souhaitent me rencontrer. C’est ainsi qu’apparaissent dans mon bureau, Serge Fiori et Louis Valois qui furent, comme on sait, les fondateurs d’Harmonium. Je les écoute avec plaisir et suis touchée par leur univers musical. Je ne le sais pas encore, mais toutes les autres maisons de disques les ont refusées. »

Elle poursuit en disant que :  « Bien que j’aime beaucoup leur musique, je leur explique que nous ne produisons pas malheureusement d’artistes francophones. Par contre, je leur promets que j’allais voir les possibilités avec mon siège social à Toronto. J’envoie donc la cassette à Toronto à notre producteur qui, à ma grande surprise, me dit qu’il aime. Le président me téléphone pour me dire qu’ils vont signer pour deux albums… mais il me prévient que si ça ne vend pas, plus question de proposer d’autres artistes québécois. »

Heureusement, le succès est fulgurant. L’album atteint le statut platine, avec plus de 100 000 exemplaires vendus. Elle ajoute que : « J’ai d'ailleurs fièrement chez moi un album platine qu’on m’a remis (comme on peut voir son nom sur la photo à la UNE). Et j’ai eu la chance d’être mentionnée dans la biographie du grand (même s’il était petit) Fiori qui affirme que c’est moi qui ai signé le début de leur carrière, une fierté immense.  Comme disent les Anglais The Rest is History. »

Nicolle se souvient de Serge Fiori comme d’un être timide et tourmenté, marqué par une enfance difficile. C’est sa grand-mère, aimante et présente, qui avait comblé certains vides. Et la musique, bien sûr,  est devenue un exhutoire et sa passion absolue. Très jeune, Serge accompagnait son père musicien dans les mariages et fêtes italiennes. Il a appris à jouer instinctivement de multiples instruments de musique à l’oreille. La musique fut d'ailleurs sa maîtresse tout sa vie.

Bon voyage, Serge. Continue tes rencontres musicales dans l’au-delà. Nous en avions eu un petit aperçu dans Heptade.

Nicolle Dufour